Le début d’année est toujours l’occasion de dessiner les tendances du marché de l’emploi. Après une année 2011 relativement porteuse et dynamique, 2012 s’annonce globalement tendue et exigeante face à la frilosité et l’absence de confiance de la part de l’ensemble des acteurs.
Je ne vous apprendrai rien si je vous annonce que 2012 sera rude sur le marché de l’emploi en France dans le secteur financer. Du côté des banques, 2011 fut marquée par la réduction des bilans et des effectifs : BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale, BPCE, toutes ont taillé sec dans leurs rangs, à commencer par ceux de leur BFI. Après plusieurs années de vaches grasses, les banques vont réduire la voilure avec 5 000 embauches en moins pour cette année (soit -25% par rapport à 2011). Rappelons que l’industrie financière constitue structurellement le plus gros employeur en France, banques et assurances représentant environ 3,4 % de l'emploi salarié (1).
Ce coup de frein brutal « officialise » l’entrée dans une nouvelle ère pour la banque hexagonale, après les nombreuses tensions sur la liquidité ou sur la solvabilité des établissements depuis l'été dernier. L'aggravation de la crise économique et financière ainsi que les évolutions réglementaires (Bâle III, Solvabilité II) qui l'accompagnent redistribuent les cartes au sein de l’ensemble des métiers de la banque.
Alors oui, le renouvellement des effectifs (dû à une pyramide des âges vieillissante) continuera à maintenir l’illusion d’un secteur dynamique cette année. Mais il sera progressivement remplacé par un pilotage plus fin des effectifs et des recrutements.
Les deux mots d’ordre : flexibilité et persévérance !
Dans un environnement aussi agité et incertain, les banques auront beaucoup de difficulté à anticiper leurs besoins de recrutement sur le moyen / long terme. La baisse des budgets alloués aux recrutements, la mise en stand-by de projets, le recours accru à la mobilité interne seront autant d’éléments qui conduiront à une réduction significative du volume des embauches en CDI. L’intérim et le CDD seront donc privilégiés afin de garantir une qualité de service constante et optimale.
En parallèle, l’allongement des processus de recrutement devrait aussi se confirmer, tout type de contrat confondu. Les banques restent désespérément en quête de profils très techniques et expérimentés. Bien évidemment, un entretien avec un opérationnel peut parfois suffire au pour se décider sur le recrutement d’un intérimaire. S’il s’agit d’un CDI, prévoyez plutôt 3 à 4 entretiens. Quant aux sociétés de gestion, elles n’hésitent pas à pousser le bouchon jusqu’à 6 entretiens ! Enfin, le monde impitoyable de la finance de marchés exigera plus que jamais un profil international (expériences réussies à l’étranger, bilingue en anglais, voire trilingue).
En résumé, la tendance est à l’allongement des recrutements afin d’embaucher the best one. Et quand bien même ce serait le cas, ben un ptit CDD de 6 mois permettra de s’en assurer, histoire de lever les derniers doutes qui subsistent (si c’est encore possible après 5-6 entretiens). Attendez-vous donc à une très forte exigence en termes de compétences techniques, savoir-être, capacité d’adaptation, personnalité ou encore ambitions.
[L’incertitude liée à l’instabilité économique actuelle joue un rôle majeur dans la frilosité des recrutements]
Les profils gagnants de 2012
Qu’on se le dise, les seniors et jeunes diplômés vont encore beaucoup souffrir du contexte économique morose. Les intentions d’embauche concernant ces populations reculent encore davantage. La concurrence s’annonce rude.
Parmi les secteurs les plus porteurs, on retrouve :
> l’assurance : les profils commerciaux sont toujours autant plébiscités. Un renforcement des forces commerciales devrait, peu à peu, entraîner une relance des recrutements de gestionnaires et techniciens et, à terme, des postes d’encadrement. De même, les assurances et autres organismes de prévoyance devraient s’arracher les profils actuaire, auditeur interne et contrôleur des risques suite à l’arrivée de nouvelles normes (Solvabilité II en tête)
> les banques : bien entendu, celles-ci vont encore recruter en masse, quand bien même elles s’afficheront plus modestes. L’ordre du jour ? Retour aux fondamentaux. 2012 devrait donc faire la part belle aux activités nécessitant peu (voire pas) de fonds propres comme le Corporate Banking et le Cash Management. Les fonctions commerciales (chargé d’affaires, chargé d’entreprises, conseiller en patrimoine, responsable d’agence…) seront encore très demandeuses de profils en tout genre
Les fonctions Contrôle et Risques continueront leur quête de Risk manager, Compliance officer et autres Contrôleur en risques de crédit. Enfin, les directions financières se montrent friandes de spécialistes experts en suivi budgétaire, prévisions, reporting de gestion et autres recommandations, mais également des gestionnaires de projet de transformation des systèmes et organisations comptables. Tout ce qu’il faut pour op-ti-mi-ser à fond, partout
> les sociétés de gestion : celles-ci cibleront avant tout les gérants ayant leur propre portefeuille clients, ainsi que des commerciaux et des analystes financiers
> l’audit : peu mis en avant, les auditeurs confirmés (3 à 5 ans d’expérience) sauront se faire entendre sur le marché de l’emploi.
Le calme avant la tempête ?
Et si, finalement, l’embellie venait des salariés eux-mêmes ? Difficile de quitter son poste actuel alors que le marché de l’emploi reste anémique. Pour autant, combien de temps chacun pourra-t-il tenir ?
En effet, 1 cadre sur 2 juge que sa rémunération n'est pas en adéquation avec sa charge de travail et son implication. En outre, en ce qui concerne les effets de la crise, plus de quatre cadres sur dix (41%) estiment que les pratiques managériales se sont détériorées. Enfin, 43% des cadres estiment que leur temps de travail a augmenté depuis le début 2011 et 36% disent de même au sujet de leur charge de travail (2).
2013, cela fera déjà quatre ou cinq ans que nous serons en récession. Un seuil maximum de tolérance pour ceux qui aspirent à bouger. Et une fois leur décision prise, les recrutements pour remplacer les départs deviendront aussitôt indispensables et l’effet boule de neige s’amorcera. Il s’agira alors de ne pas rater le train en marche.
(1) Source : association Paris Europlace
(2) Enquête réalisée par l'institut OpinionWay en janvier 2012
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